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« Une solution sans le PKK et Ocalan est impossible » : interview avec Cemil Bayik du KKK.



Interview avec Cemil Bayik de la Confédération Démocratique du Kurdistan (KKK)

16 mai 2006 / Aziz Ozgur pour la traduction anglaise à partir de l’original en Turc.

Interview donnée à Yeni Özgür Politika le 5 mai 2006.

Les rapports récents des fonctionnaires de l’UE concernant le mouvement Kurde suggèrent que l’UE ne souhaite pas que la question Kurde soit résolue. C’est l’évaluation de Cemil Bayik, membre du Conseil exécutif de la Confédération Démocratique du Kurdistan (KKK). M. Bayik a également alerté sur la répression croissante du parti pro-Kurde de la Société Démocratique (DTP), et également dit que le KKK résistera à toutes les tentatives visant à le détruire.

-  L’UE semble avoir pris l’initiative contre votre mouvement, faisant souvent des rapports invitant les Kurdes à « abandonner le PKK et Abdullah Ocalan ». Le plus récemment un fonctionnaire de l’UE, Joost Lagendijk, a fait des rapports semblables. Quelle est votre réaction à ces rapports ?

L’UE ne veulent pas que la question Kurde soit résolue et il n’y a aucune politique significative de l’UE qui aide à trouver une solution. Si l’UE avait voulu véritablement résoudre la question Kurde elle aurait proposé un programme ou aurait saisi l’occasion de discuter de la question quand notre chef, Abdullah Ocalan, était en Europe où il avait proposé une résolution concrète en sept étapes. Si l’UE avait été sérieuse au sujet de trouver une solution elle aurait offert un refuge à notre chef. L’UE a non seulement rejeté l’occasion d’être un catalyseur pour une solution mais elle a également favorisé la conspiration internationale contre notre chef.

L’UE invite maintenant les Kurdes à renoncer à leur soutien au PKK et à Ocalan en parlant d’une solution « sans le PKK et Ocalan ». L’UE sait très bien que la question Kurde en Turquie ne peut pas être résolue sans participation du PKK et d’Ocalan. Ainsi par ces rapports l’UE renforce la politique de refus et de destruction de la Turquie. L’attitude de l’UE alimente la violence de la Turquie et la poursuite de la guerre. Si l’UE voulait résoudre la question elle n’aurait pas soutenu la Turquie, alors la Turquie aurait été forcée de prendre des mesures pour résoudre la question.

M. Lagendijk, Président de la commission parlementaire mixte de l’EU-Turquie, base en fait ses données sur la question sur l’information qu’il reçoit des cercles turcs. Il ne considère pas les Kurdes et le PKK comme étant digne d’une consultation ou de considération. Basé sur une information fausse, M. Lagendijk fait réellement un jugement contre le PKK. Les Européens doivent résister à cette politique qui mène à l’impasse sur la question Kurde et affecte chacun, les Kurdes, les Turcs et l’Europe.

Nous croyons que l’Europe essaye d’obtenir la stabilité. Si c’est vrai, alors l’Europe doit viser pour la stabilité en Turquie qui est après tout un Etat candidat à en être membre. À moins que la question Kurde ne soit résolue, la démocratisation et les règles de loi européenne, comme le mode de vie, ne pourront pas être réalisés en Turquie.

Nous nous attendons à ce que Lagendijk et l’UE respectent le choix et la volonté du peuple Kurde. Le 15 février (l’anniversaire de l’arrestation d’Ocalan), le 8 mars (la journée internationale des femmes) et pendant le Newroz les gens ont montré leur soutien au PKK et à Ocalan par le slogan « le PKK est le peuple ». Les Kurdes portaient partout des photos d’Ocalan et déclaraient qu’Ocalan était le représentant de leur volonté politique. M. Lagendijk qui parle de la démocratie n’identifie pas cela et déclare au peuple que « Ocalan ne vous représente pas ». Je ne pense pas que cette attitude reflète un engagement vis-à-vis de la démocratie.

-  L’UE accuse le mouvement Kurde de ne pas être démocratique. Est-ce le mouvement Kurde ou l’UE qui est anti-démocratique ?

Le peuple Kurde résiste, sous peine de mourir, à la tyrannie, à la torture et à l’oppression. En dépit de tous ces risques les Kurdes ont dit qu’Ocalan était leur représentant légitime. Cependant L’UE essaye de définir la volonté des Kurdes. Ce n’est pas la démocratie. Dans la démocratie les gens choisissent pour eux-mêmes. Les Kurdes ne peuvent pas accepter ce rejet de leur choix démocratique par l’Europe ou M. Lagendijk.

Les Kurdes ont combattu pendant 30 années et ont souffert énormément. 4.000 villages Kurdes ont été brûlés entièrement par l’armée turque. Trois millions de Kurdes ont été forcés de quitter leurs maisons et de devenir réfugiés.

Des millions sont devenus des réfugiés dans leur propre pays et ont été soumis au chômage et à la faim. Certaines de ces personnes ont été contraintes de se livrer au crime et au commerce du sexe. Ceci est mis sur le dos du PKK. Cependant nous savons que le JITEM (services spéciaux de la gendarmerie turque) organise les jeunes sans foyer dans Diyarbakir en les poussant dans des activités illégales. Certains de ces enfants sont envoyés dans des villes telles qu’Istanbul et Izmir où ils sont poussés dans des activités illégales. Plus tard quand ils sont arrêtés les autorités affirment que le PKK tire bénéfice de ces crimes. Ces faits doivent être reconnus par M. Lagendijk et UE.

Je crois que l’incident de Semdinli a montré la réalité de la Turquie une fois de plus. Cet incident a clairement identifié les forces de la sale guerre au Kurdistan qui peuvent être vues dans l’acte d’accusation préparé par le procureur de Van. Cet acte d’accusation a été préparé par un fonctionnaire d’état et confirme que les fonctionnaires, la police turque et les gangs organisés par ces seigneurs de guerre sont responsables de massacres, de bombardements et d’extorsions extrajudiciaires. Toutes ces forces illégales et leurs activités ont été coordonnées par Yasar Buyukanit, commandant en chef des forces terrestres turques. Accuser le PKK de la violence et nous désigner comme terroriste, faire abstraction de la volonté de notre peuple, à un moment où nous sommes confrontés à de telles réalités, n’est pas en conformité avec la démocratie. Cette attitude représente le mépris et l’ignorance totale envers la lutte de notre peuple pour la liberté.

Certains cercles en Turquie déclarent que le PKK est un obstacle pour atteindre une solution dans la question Kurde. Ces cercles déclarent que le PKK impose ses politiques sur tous ceux qui sont impliqués dans la question Kurde et en conséquence que le mouvement Kurde n’est pas démocratique. Ils disent que les Kurdes ne peuvent pas réaliser la démocratie à moins que le monopole du PKK sur la question Kurde soit annulé. On suggère que si le PKK se dissolvait la question Kurde pourrait être résolue. Le but ici est clairement de casser l’organisation, la volonté et le réveil du peuple Kurde qui ont été réalisés par le PKK.

Le PKK et notre Chef Abdullah Ocalan ont mené la lutte la plus significative pour la démocratisation au Kurdistan. En raison de notre lutte nous avons développé des valeurs sociales modernes et civilisées par une transformation sociale. Le statut des femmes Kurdes est la meilleure évidence pour ce rapport. Aujourd’hui les femmes Kurdes prennent un rôle prépondérant dans les mouvements civils et nos forces de guérilla. C’est l’acte de démocratisation le plus significatif.

-  L’état turc et les cercles étrangers visent les organismes politiques Kurdes légaux. Quelle est votre réaction aux attaques sur les organisations politiques Kurdes légales ?

L’activité politique Kurde légale a des imperfections et des faiblesses. Tous les efforts faits par l’état turc sont dirigés sur ces faiblesses, sont faits de manière à ce que les Kurdes le paient politiquement. Ils essayent d’amoindrir l’activité politique Kurde légale. Par des arrestations, des menaces et même le meurtre ils essayent de supprimer le mouvement légal Kurde. Cependant en dépit des imperfections le mouvement légal Kurde résiste. Ils essayent évidemment de créer des brèches dans le mouvement légal. Par la répression ils visent en outre à apaiser ou acheter certains parmi le mouvement légal.

Les fonctionnaires d’état font constamment pression sur le mouvement légal en les invitant « à couper toutes les liens avec le PKK et Ocalan » - comme si il y avait n’importe quel lien. Le but est de diviser les forces Kurdes les unes contre les autres. En d’autres termes ils essayent de frapper les Kurdes avec d’autres Kurdes. Le même jeu est joué contre divers mouvements légaux Kurdes et là encore le but est de détruire des organisation Kurdes agissant dans le secteur légal. La même stratégie est mise en application contre nos forces de guérilla.

La méthode peut être différente mais le but essentiel est identique ; pour casser la volonté du peuple Kurde. Le mouvement Kurde dans tous les secteurs, du mouvement légal aux forces de la guérilla, montre une résistance énorme. Les Kurdes sont persistants dans leur lutte pour la liberté. Notre résistance rend la solution de la question Kurde inévitable. Les fonctionnaires turcs peuvent essayer de gagner plus de temps, il pourrait y avoir plus de répression et torture, nous pouvons devoir faire des sacrifices mais la solution est inévitable. Tôt ou tard la Turquie devra prendre en compte la question Kurde.

-  Que ferez-vous contre l’ingérence régionale et internationale ? Quelle est la probabilité d’une escalade dans la violence ?

2006 sera une année difficile. Quoique nous ne voulions pas la guerre et appelons à une solution politique démocratique de la question Kurde, des officiels turcs, menée par Yasar Buyukanit, insistent pour la terreur, la violence et la guerre. La Turquie espère continuer ses vieilles politiques. La Turquie vise à défaire les Kurdes par l’agression militaire, l’isolement et la répression contre notre mouvement. Nous n’avons aucune autre option que de résister à de telles attaques. La résistance est notre droit légitime. La résistance est un droit en vertu du droit international. Tant que la question Kurde demeure non définie nous recourrons à notre droite légitime à la résistance. Nous n’accepterons ni la reddition ni la mort.

Nous combattons pour notre droit à la liberté et à la dignité. Nous croyons qu’une solution ne peut pas être réalisée par la guerre, la répression et la tyrannie. L’état turc doit bientôt réaliser cela et abandonner ses politiques habituelles. La Turquie doit prendre en compte la question Kurde et accepter le besoin de se déplacer vers une solution.

La Turquie ne peut pas avoir les moyens d’effectuer des calculs faux. Nos forces de guérilla et le peuple Kurde se tiendront fermes. Nous casserons l’isolement diplomatique entourant notre mouvement dans l’arène internationale.

L’année 2006 peut ne pas produire immédiatement les résultats que nous désirons. Ce sera une année de lutte difficile. Nous ne pouvons pas nous permettre de faire des erreurs. Je crois que tous nos membres et le peuple réalisent cela. Nous déferons la politique de refus et d’annihilation jusqu’à la victoire.

Les femmes et la jeunesse joueront un rôle important dans notre lutte. Les femmes et la jeunesse ont un rôle social prépondérant.





Sources : http://apa.online.free.fr/article.php3?id_article=1018